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Musset.1835-1837, Les Nuits.
Du temps que j'étais écolier,
Je restais un soir à veiller
Dans notre salle solitaire,
Devant ma table vint s'asseoir
Un pauvre enfant vêtu de noir,
Qui me ressemblait comme un frère.
Son visage était triste et beau,
A la lueur de mon flambeau,
Dans mon livre ouvert il vint lire,
Il pencha son front sur ma main,
Et resta jusqu'au lendemain,
Pensif, avec un doux sourire.
Comme j'allais avoir quinze ans,
Je marchais un jour, à pas lents,
dans un bois, sur une bruyère,
Au pied d'un arbre vint s'asseoir,
Un jeune homme vêtu de noir,
Qui me ressemblait comme un frère.
Je lui demandai mon chemin;
Il tenait un luth d'une main,
De l'autre un bouquet d'églantine,
Il me fit un salut d'ami,
Et, se détournant à demi,
Me montra du doigt la colline.
A l'âge ou l'on croit à l'amour,
J'étais seul dans ma chambre un jour,
Pleurant ma première misère,
Au coin de mon feu vint s 'asseoir
Un étranger vêtu de noir,
Qui me ressemblait comme un frère.
Il était morne et soucieux;
D'une main il montrait les cieux,
Et de l'autre il tenait un glaive,
De ma peine il semblait souffrir,
Mais il ne poussa qu'un soupir,
Et s'évanouit comme un rêve.
A l'âge ou l'on est libertin,
Pour boire un toast en un festin,
Un jour je soulevai mon verre,
En face de moi vint s'asseoir,
Un convive vêtu de noir,
Qui me ressemblait comme un frère.
Il secouait sous son manteau
Un haillon de pourpre en lambeau,
Sur sa tête un myrte stérile,
Son bras maigre cherchait le mien,
Et mon verre, en touchant le sien,
Se brisa dans ma main débile.
Tags : noir, vetu, asseoir, vint, ressemblait
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