• Dans un chemin, sablonneux, malaisé,
    Et de tous les côtés au soleil exposé,
    Six forts chevaux tiraient un coche.
    Femmes, moines, vieillards, tout était descendu:
    L'attelage suait, soufflait, était rendu.
    Une mouche survient, et des chevaux s'approche,
    Prétend les animer par son bourdonnement,
    Pique l'un, pique l'autre,
    et pense à tout moment
    Qu'elle fait aller la machine,
    S'assied sur le timon, sur le nez du cocher.
    Aussitôt que le char chemine,
    Et qu'elle voit les gens marcher,
    Elle s'en attribue uniquement la gloire,
    Va, vient, fait l'empressée: il semble que ce soit
    Un sergent de bataille allant en chaque endroit
    Faire avancer ses gens et hâter la victoire.
    La mouche, en ce commun besoin,
    Se plaint qu'elle agit seule, et qu'elle a tout le soin
    Qu'aucun n'aide aux chevaux à se tirer d'affaire.
    Le moine disait son bréviaire:
    Il prenait bien son temps! Une femme chantait:
    C'était bien de chansons qu'alors il s'agissait!
    Dame mouche s'en va chanter à leurs oreilles,
    Et fait cent sottises pareilles
    Après bien du travail, le coche arrive au haut.
    Respirons maintenant, dit la mouche aussitôt:
    J'ai tant fait que nos gens sont enfin dans la plaine.
    ça, Messieurs les chevaux, payez-moi de ma peine.

    Jean de la Fontaine.

    Ainsi certaines gens, faisant les empressés,
    S'introduisent dans les affaires:
    Ils font partout les nécessaires.
    Et , partout importuns, devraient d'être chassés.
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  • Sire chat et son Petit poisson.

    Un chat sur un prunier percher tenait en ses crocs un poisson.
    _ " Pardon lui dit ce  dernier".
    Sire chat fort étonné chercha d'ou venait ce son.

    _" Ce n'est que moi , oh Sire chat! Moi le pauvre petit poisson qu'en vos crocs, vous tenez. Ne croyez pas que je me montre ingrat...votre choix est très bon...mais, petit je suis ne trouvez vous pas! Une seule bouchée et me voila gobé!"

    En sifflotant pour ne pas
    desserrer  ses crocs...Sire chat voulu répondre
    _" chur  choisson mais je n'ai que toi!"
    Se tortillant le petit poisson arriva à toucher le nez de Sire chat

    _" Me voyez-vous là Sire chat?"
    Ruminant et grondant Sire chat crachotta ce faisant...il redressa sa tête et ainsi regarda le poisson
    _" Me chrois tu bête choisson? Tout petit que tu sois, tu seras tout de même mon repas, mais comme maître corbeau Sir chat oublia que parlant , il ouvrit un peu plus sa gueule.

    Petit poisson en profita d'un souple frétillement, il s'envola et retomba là juste dans la petite Saumière ...Sire chat miaula de colère et petit poisson tout frétillant  osa un beau saut en dehors de la Saumière...


    _ Un jour poisson tu finiras dans mon estomac et j'aurai gagné.
    _ Un jour Sire chat...mais pas ce jour ...et petit poisson vécu de long jours  en jubilant du bon tour qu'il joua un jour qu'il était enfant à un pauvre Sire chat.
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  • L'âne d'un jardinier se plaignait au Destin
    De ce qu'on le faisait lever devant l'aurore.
    Les coqs, lui disait-il, ont beau chanter matin,
    Je suis plus matineux encore.
    Et pourquoi? pour porter des herbes au marché.
    Belle nécessité d'interrompre mon somme!
    Le Sort, de sa plainte touché,
    Lui donne un autre maître; et l'animal de somme
    Passe du jardinier aux mains d'un corroyeur.
    La pesanteur des peaux et leur mauvaise odeur
    Eurent bientôt choqué l'impertinente bête.
    J'ai regret, disait-il, à mon premier seigneur.
    Encor, quand il tournait la tête,
     J'attrapais, s'il m'en souvient bien,
    Quelque morceau de chou qui ne me coûtait rien:
    Mais ici point d'aubaine, ou, si j'en ai quelqu'une,
    C'est de coups. Il obtint changement de fortune;
    Et sur l'état d'un charbonnier
    Il fut couché tout le dernier.
    Autre plainte. Quoi donc! Dit le Sort en colère,
    Ce baudet-ci m'occupe autant
    Que cent monarques pourraient faire!
    Croit-il être le seul qui ne soit pas content?
    N'ai-je en l'esprit que son affaire?


    Le Sort avait raison. Tous gens sont ainsi faits:
    Notre condition jamais ne nous contente:
    La pire est toujours la présente.
    Nous fatiguons le Ciel à force de placets.
    Qu'à chacun Jupiter accorde sa requête,
    Nous lui romprons encor la tête!

    Jean de la Fontaine.
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  • Jupiter eut jadis une ferme à donner.
    Mercure en fit l'annonce, et gens se présentèrent,
    Firent des offres, écoutèrent:
    Ce ne fut pas sans bien tourner;
    L'un alléguait que l'héritage
    Etait frayant et rude, et l'autre un autre si.
    Pendant qu'ils marchandaient ainsi,
    Un deux, le plus hardi, mais non pas le plus sage,
    Promit d'en rendre tant, pourvu que Jupiter
    Le laissât disposer de l'air,
    Lui donnât raison à sa guise,
    Qu'il eût du chaud, du froid, du beau temps, de la bise,
    Enfin du sec et du mouillé,
    Aussitôt qu'il aurait baillé.
    Jupiter y consent. Contrat passé, notre homme
    Tranche du roi des airs, pleut, vente, et fait en somme
    Un climat pour lui seul: Ses plus proches voisins
    Ne s'en sentaient non plus que les Américains.
    Ce fut leur avantage: Ils eurent bonne année,
    Pleine moisson, pleine vignée( Vendange) .
    Monsieur le receveur fut très mal partagé.
    L'an suivant, voilà tout changé:
    Il ajuste d'une  autre sorte
    La température des cieux.
    Son champ ne s'en trouve pas mieux;
    Celui de ses voisins fructifie et rapporte.
    Que fait-il? Il recours au monarque des dieux;
    Il confesse son imprudence.
    Jupiter en usa comme un maître fort doux.
    Jean de la Fontaine.
    Concluons que la Providence Sait ce qu'il nous faut mieux que nous.
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  • A M. de Bartillon.( Ambassadeur de France en Angleterre).

    La qualité d'ambassadeur
    Peut-elle s'abaisser à des contes vulgaires?
    Vous puis-je offrir mes vers et leurs grâces légères?

    S'ils osent quelquefois prendre
    un air de grandeur,seront-ils point traités
    par vous de téméraires?

    Vous avez bien d'autres affaires
    A démêler que les débats
    Du Lapin et de la Belette.
    Liez-les; ne les lisez pas:

    Mais empêchez qu'on ne nous
    mette toute l'Europe sur les bras.
    Que de mille endroits de la terre
    Il nous vienne des ennemis,

    J'y consens; mais que l'Angleterre
    Veuille que nos deux rois se lassent d'être amis,
    J'ai peine à digérer la chose.
    N'est-il point encor temps que Louis se repose?

    Quel autre Hercule enfin ne se trouverait las
    De combattre cette hydre?

    Et faut-il quelle oppose

    Une nouvelle tête aux efforts de son bras?

    Si votre esprit plein de souplesse,

    Par éloquence et par adresse,
    Peut adoucir les coeurs et détourner ce coup,

    Je vous sacrifierai cent moutons: c'est beaucoup
    Pour un habitant du Parnasse.
    Cependant faites-moi la grâce
    De prendre en don ce peu d'encens.

    Prenez en gré mes voeux ardents,
    Et le récit en vers qu'ici je vous dédie.
    Son sujet vous convient; je n'en dirai pas plus:
    Sur les éloges que l'envie
    Doit avouer qui vous sont dus,
    Vous ne voulez pas qu'on appuie.

    Dans Athène autrefois, peuple vain et léger,
    Un orateur, voyant sa patrie en danger,
    Courut à la tribune; et, d'un art tyrannique,

    Voulant forcer les coeurs dans une république,
    Il parla, fortement sur le commun salut:
    On ne l'écoutait pas.
    L'orateur recourut

    A ces figures violentes
    Qui savent exciter les âmes les plus lentes.
    Il fit parler les morts, tonna, fit ce qu'il put;

    Le vent emporta tout, personne ne s'émut.
    L'animal aux têtes frivoles,
    Etant fait à ces traits, ne daignait l'écouter;
    Tous regardaient ailleurs: Il en vit s'arrêter

    A des combats d'enfants, et point à ses paroles.
    Que fit le harangueur?
    Il prit un autre tour.
    Cérès, commença -t-il, faisait voyage un jour
    Avec l'anguille et l'hirondelle.
    Un fleuve les arrête, et l'anguille en nageant,

    Comme l'hirondelle en volant, le traversa bientôt.
    L'assemblée à l'instant
    Cria tout d'une voix:
    Et Cérès, que fit-elle?
    Ce qu'elle fit!

    un prompt courroux L'anima d'abord contre vous.
    Quoi! de contes d'enfant son peuple s'embarrasse;
    Et du péril qui le menace
    Lui seul entre les Grecs il néglige l'effet!

    Que ne demandez-vous ce que Philippe fait?

    A ce reproche l'assemblée,
    Par l'apologue réveillé,
    Se donne entière à l'orateur.
    Un trait de fable en  eut l'honneur.

    ' Nous sommes tous d'Athène en ce point, et moi-même,
    Au moment que je fais cette moralité,
    Si peau-d'âne m'était conté,

    j'y prendrais un plaisir extrême.
    Le monde est vieux, dit-on:
    je le crois;
    cependant il le faut amuser encor comme un enfant.
    Jean de la Fontaine.

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  •  ou L'Imitation Stupide ...et Cuisante.

    Compère Lapin apparaît souvent dans les récits afro-américains, notamment en Caroline du Sud.

    Chaque matin, en se rendant au champ, Compère Lapin passait devant le bon vieux coq, perché au sommet de la grange et occupé à s'époumoner.

    En fin de journée, quand notre ami rentrait de son travail, il trouvait la volaille fidèle à son poste...mais sans tête et sur une seule patte.

    " Ohé, monsieur le coq! cria t-il un soir. Pourquoi vous débarrassez vous tous les jours de votre tête et de l'une de vos pattes pour les récupérer au matin?

    - C'est ma façon de me reposer" Répondit l'oiseau en ouvrant un oeil las.

    " Pas mal, comme idée! Songea le lapin sans beaucoup réfléchir. Je vais en faire autant."

    Parvenu chez lui, il pria son épouse de le décapiter et de lui trancher trois pattes sur quatre, afin qu'il bénéficie d'un sommeil réparateur.

    Sans se poser de question, elle incisa l'une des pattes avant du  Compère, lui arrachant un hurlement de douleur... qui réveilla le coq.

    Le volatile sortit de dessous son aile sa tête, qu'il avait voulu abriter des rayons de lune. Puis il déplia sa deuxième patte, qu'il tenait au chaud sous son ventre.

    " Un peu de silence, s'il vous-plait!" Fit-il avant de se rendormir.

    Comprenant sa méprise, Compère Lapin soigna sa blessure et se promit de raisonner davantage la prochaine fois:

    son manque de recul lui avait joué un vilain tour qui aurait pu lui être fatal.
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  • Cette histoire a longtemps existé sous forme orale avant d'être intégrée au ! Par Gautier de Châtillon à son épopée l'Alexandreide, poème en Latin racontant les exploits d'Alexandre le Grand.

    L'inimitié entre le lion et la licorne remontait si loin qu'aucun des deux ne se rappelait ni quand ni comment elle avait commencé.

    A chaque rencontre, ils se mesuraient l'un l'autre, physiquement ou verbalement. Cependant, avec les années, ils perdirent chacun de leur vigueur.

    Le souffle était plus court et les membres moins agiles. Un jour le lion, exagérant sa décrépitude, se traîna jusqu'à l'endroit ou habitait la licorne. "

    "Faisons une trêve, suggéra le fauve d'une voix chevrotante. Me voici devenu inoffensif

    .- Qu'attends-tu de moi? Demanda l'équidé, méfiant, apercevant le trouble dans les yeux de son ennemi.

    - Je viens à toi, répondit le lion, parce que ma fin est proche. Avant de mourir, je tiens à prendre congé de mon épouse, une vieille lionne établit dans le désert.

    Je ne pense pas y arriver à temps sans un bâton pour m'appuyer. Veux-tu me prêter ta corne? Solide et à ma taille, elle m'aiderait énormément.

    Je m'engage à te la rendre dès que j'aurai fait mes adieux à ma femme." Affectant alors une immense tristesse, le rusé parvint à verser une larme.
     

    " Peut-être des ennemis jurés peuvent-ils devenir les meilleurs amis du monde..." dit-il alors en s'essuyant les yeux d'une patte fatiguée.

    Emue jusqu'à la moelle comme l'espérait le fauve, l'innocente se laissa fléchir. Hélas! Dépourvue de cet appendice, une licorne n'est plus qu'une blanche jument avec, pour seules armes, sa célérité et la dureté de ses sabots.

    Dès que le lion disposa du tranchant instrument, il se jeta sur sa bienfaitrice et le lui enfonça dans le flanc. Terrassée, pantelante, la pauvre bête murmura dans un souffle:

    ' Ta malhonnêteté dépasse ta cruauté! Comment oses-tu récompenser de la sorte ma noblesse de coeur?

    -Idiote! rétorqua l'assassin avec un rire mauvais. Ignorais-tu qu'épargner la vie de ses adversaires présentait des risques? Apprends que les beaux gestes ne servent à rien entre ennemis héréditaires.


    - Et toi, rappelle-toi que le vainqueur est celui qui s'en tire avec dignité" répondit la licorne afin de ne pas être en reste. Puis prenant à témoin les quatre points cardinaux, elle prononça ses ultimes paroles d'une voix magnifique:


    " Ma chute s'explique par une trêve fallacieuse. L'honneur est sauf." Pourtant, comme elle expirait, le lion rugit le mot de la fin:

    " Si tu veux la paix, prépare la guerre, dit-on. Se protéger est un devoir, même quand l'ennemi semble diminué."Le Lion et la Licorne.
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